Villejuif espère tirer profit de ses nouvelles gares pour attirer entreprises et emplois. Reste cependant à réussir à créer du lien entre des secteurs
Villejuif espère tirer profit de ses nouvelles gares pour attirer entreprises et emplois. Reste cependant à réussir à créer du lien entre des secteurs qui risqueraient de s’ignorer. Avec, d’un côté, les futurs quartiers de gare et le nouveau quartier résidentiel Campus Grand Parc et, de l’autre, le centre historique à redynamiser et les quartiers en rénovation urbaine, la ville est à la recherche d’équilibre.
Accueillir de nouvelles gares, de nouveaux quartiers, de nouvelles entreprises. C’est le pari auquel est confrontée Villejuif. Si l’on en croit les projets portés par la Société du Grand Paris et la RATP, elle fera partie des villes les plus avantagées en termes de dessertes : deux gares de la lignes 15 du Grand Paris Express et une station de la ligne 14 du métro prolongée s’implanteront respectivement en 2022 et 2023. Encore faut-il pouvoir équilibrer tout ça, en intégrant ces futurs secteurs au tissu existant, sans abandonner les quartiers les plus modestes.
Longtemps considérée comme presque exclusivement résidentielle, la commune espère aujourd’hui inverser la tendance et devenir une terre d’accueil des grandes entreprises. « Les nouvelles stations seront l’occasion d’amorcer un rééquilibrage. D’ici 15 ans, nous espérons avoir un tissu urbain composé à 50 % d’habitat et à 50 % d’activité économique », explique Véronique Monton, chef de projet stratégie territoriale et Grand Paris à la mairie de Villejuif.
Faire converger les secteurs
Soucieuse de convergence, la ville ne laisse rien au hasard et sait exactement quel type d’entreprises elle souhaite voir s’installer autour de l’hôpital Gustave Roussy. Déjà connu depuis de nombreuses années pour abriter l’un des plus grands centres européens de recherche contre le cancer, le quartier scientifique devrait poursuivre dans cette voie, notamment en favorisant les rapprochements entre les chercheurs de Gustave Roussy et les industriels producteurs de médicaments.
La ville espère également marier deux autres secteurs d’activités. « Nous souhaitons favoriser les liens entre les domaines de la santé et du numérique, notamment pour encourager le développement d’applications », poursuit Véronique Monton. Cette ambition sera facilitée par la couverture numérique que prévoit d’installer la Société du Grand Paris sur l’ensemble des quartiers de gare. Une opportunité pour la ville de mettre en œuvre son « effet cafétéria » – une expression désignant la création de lieux d’échanges pour encourager les rencontres entre professionnels – qui pourrait passer par la construction de tiers-lieux connectés.
100 000 voyageurs par jour
Autre voie, celle du tertiaire, cette fois sur le Triangle Aragon, situé à proximité de la nouvelle gare du même nom. Ici, pas de prétention scientifique. Le quartier devrait plutôt accueillir des services et des commerces de proximité. Mais point trop n’en faut : « Tout l’enjeu sera de ne pas fragiliser les commerces de centre-ville, qui souffrent comme ailleurs d’une baisse de fréquentation. L’aménageur Sadev 94 a déjà prévu de diminuer leur nombre pour ne pas exacerber la concurrence », indique Alexandre Moënne-Loccoz, directeur de l’urbanisme à la mairie de Villejuif. Aragon, que la municipalité appelle déjà la « nouvelle Bastille » en raison des 100 000 voyageurs par jour prévus, pourrait faire de l’ombre au centre historique en raison de la forte affluence attendue. Au service économique, si on rêve de voir ce quartier se transformer en Triangle d’Or, on reste prudent : « Nous nous efforçons de ne pas produire trop d’immobilier afin de garder une stratégie de développement raisonnée et adaptée au territoire, en adéquation avec la programmation du quartier d’affaires Cœur d’Orly », précise Alexandre Moënne-Loccoz.
Une chose est sûre, si Villejuif réfléchit encore à l’équilibre à adopter en matière de densité, elle s’attend à voir sa population nettement augmenter. Elle passerait de 56 000 habitants aujourd’hui à 70 000 en 2025. Et, là aussi, la ville a son idée sur les populations qu’elle souhaite attirer en priorité. D’abord la classe moyenne afin de redynamiser la consommation et soutenir l’activité des commerces de proximité. Avec des logements neufs avoisinant les 5 600 euros du mètre carré (alors que d’autres seront vendus aux alentours de 4 200 euros dans les quartiers en politique de la ville), l’appel est lancé. Deuxième population recherchée : les étudiants en sciences médicales de l’École universitaire interdisciplinaire de santé et ceux des écoles d’ingénieurs. L’arrivée de ces filières, qui devraient être accompagnées de construction de résidences étudiantes, pourrait être l’occasion de concrétiser ce « boulevard de l’étudiant » cher à la commune. Enfin, il s’agira d’attirer, si possible plus de 24 heures, les scientifiques et chercheurs internationaux sur le site de Gustave Roussy. À cet effet, des hôtels et des hébergements temporaires devraient sortir de terre dans les prochaines années.
Les habitants attachés à leur quartier
Reste à se demander ce que sera la place des quartiers en rénovation urbaine. Les projecteurs sont moins braqués sur eux. Pourtant, une dynamique se crée. En 2014, le quartier Lebon/Lamartine, limitrophe de la commune de l’Haÿ-les-Roses, était sélectionné par l’État afin de bénéficier de l’aide de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru). Construit dans les années 1960, le quartier accueille actuellement quatre tours et trois immeubles, soit un total de 560 logements sociaux.
Face aux chantiers qui s’annoncent un peu partout dans la ville et dans leur quartier, les habitants sont catégoriques : ils ne veulent pas voir leurs immeubles détruits. Certains avancent leur attachement au quartier, d’autres insistent plutôt sur leur refus de se voir reloger dans une ville bien plus éloignée de la Capitale tandis que les classes moyennes tant espérées prendraient place dans leur quartier rénové. Car la municipalité ne le cache pas : la moitié des logements neufs (près de 900 sont attendus à terme) seront réservés à l’accession. L’implantation d’immobilier tertiaire, devant favoriser le désenclavement du quartier, devrait également générer l’arrivée d’une population nouvelle ayant plus de moyens.
Pour améliorer l’accès à l’emploi de ses habitants, la ville mise sur la Maison de l’initiative, de l’insertion et de l’emploi qui sera créée fin 2016. Cette structure devrait travailler en réseau avec les services de l’emploi du Territoire T12 et des partenaires privés comme Aéroports de Paris et le marché de Rungis. Reste à savoir si cet équipement saura calmer les esprits inquiets face à des constructions certes prometteuses mais loin d’être sans conséquences…