« Le Grand Paris tire son attractivité de sa polyvalence et de son agilité »

« Le Grand Paris tire son attractivité de sa polyvalence et de son agilité »

Émanation de la Chambre de commerce et d’industrie de Paris, Paris–Île-de-France Capitale Économique, un regroupement d’une centaine d’entreprise

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Émanation de la Chambre de commerce et d’industrie de Paris, Paris–Île-de-France Capitale Économique, un regroupement d’une centaine d’entreprises privées et de sociétés publiques, se donne pour mission de « mettre en réseau les excellences franciliennes au service des investisseurs » et de travailler à « l’identification des signaux faibles pour que le territoire ne se fasse pas dépasser en matière de rayonnement et d’attractivité ».
Avec, depuis quelques mois, une nouvelle équipe dirigeante : Xavier Lépine, ancien président du directoire de La Française, est désormais le président de la structure ; Chloë Voisin-Bormuth, auparavant directrice des études et de la recherche à La Fabrique de la Cité, think tank des innovations urbaines créé par le groupe VINCI, en devient la directrice générale. Rencontre.

Vous venez de prendre la présidence et la direction de Paris– Île-de-France Capitale Économique. Quelles sont vos priorités ?

Avant tout, Paris–Île-de-France Capitale Économique s’appuie sur les compétences et connaissances de ses membres, réunis au sein de groupes de travail. Avec des partenaires choisis en fonction des thématiques de recherche identifiées, des études sont réalisées, ce qui permet l’émergence de recommandations. L’idée est bien de porter la connaissance, d’animer le débat puis de faire aux décideurs des propositions pour renforcer l’attractivité du territoire. On voudrait de plus en plus axer notre recherche sur l’identification des signaux faibles, afin que la région-capitale ne se fasse pas dépasser sans, finalement, que l’on ait compris au bon moment d’où pouvaient venir le danger et les opportunités. Prenez la question de la transformation des bureaux en logements. On a créé un groupe de travail sur le sujet et émis des propositions qui, pour certaines, ont pris place dans la loi Élan. On a levé un certain nombre de « mais » traditionnels qui freinaient un mouvement de transformation devenu indispensable. Par ailleurs, il faut identifier les leviers et opportunités, et s’en servir. Prenez par exemple le sport. Pour devenir une métropole sportive, et en faire un élément d’attractivité fort, le Grand Paris peut s’appuyer sur les JO qui seront une opportunité si l’on y réfléchit assez pour éviter le « one shot ». On sait qu’en matière d’environnement sportif justement, la métropole a des fragilités – une organisation qui ne s’est pas toujours illustrée par son efficacité, une accessibilité limitée des sites naturels… – qui constituent autant de marges de progression si on les identifie à temps. Nous travaillons également sur l’accueil des organisations internationales : comment faire pour qu’elles se connaissent et travaillent ensemble ? Comment valoriser leur contribution au rayonnement de la région-capitale ? Les organisations internationales font, en effet, partie d’un réseau d’excellences franciliennes qui n’est pas toujours valorisé au mieux.

On a beaucoup parlé, dans le sillage de la crise sanitaire, du départ des cadres vers des villes moyennes hors de l’Île-de-France. Cela peut-il porter tort à l’attractivité du territoire, que ce soit pour les entreprises ou pour leurs salariés ?

Oui, on a même parfois parlé, « d’exode métropolitain » : c’est très exagéré. Les déménagements observés recouvrent en réalité des situations très différentes : ceux qui peuvent télétravailler mais conservent leur emploi à Paris, ceux qui, fatigués de la ville dense, ont choisi d’habiter dans des villes moyennes à proximité directe de la région-capitale… Ceux qui sont partis ne sont pas majoritaires. Nous pensons qu’il faut se réjouir de ces mouvements plutôt que s’en alarmer. Au fond, c’est un appel d’air. L’accessibilité de ces villes moyennes de proximité doit aussi être vue comme un atout francilien plutôt que comme un danger. Peut-être, le Covid-19 a-t-il joué un rôle d’accélérateur dans ce domaine : il a encouragé une certaine souplesse et une agilité qui constituent selon nous des facteurs d’attractivité. Et rappelons un fait : la force et le dynamisme des métropoles résident dans leur capacité à fonctionner comme des « pompes », avec des habitants qui s’installent et d’autres qui s’en vont.

Pourtant, les sites spécialisés dans l’accueil des entreprises sont partiellement délaissés. Que peut faire, par exemple, un quartier comme La Défense, dont le modèle – mono-fonctionnalité, minéralité, tours – ne semble plus correspondre à la demande des entreprises ?

La question de l’obsolescence des bureaux se pose aujourd’hui avec plus d’acuité, c’est vrai. Il y a actuellement un taux de vacance de 12 % à La Défense et, d’une manière générale, la région compte entre 3 et 6 millions de mètres carrés vides. De toute façon, chaque année, mécaniquement, 1,5 million de mètres carrés deviennent obsolescents. Que va-t-on en faire ? Les maires ont longtemps, pour des raisons économiques, préféré le bureau au logement. C’est en train de changer, car l’équation économique est aujourd’hui plus favorable à la transformation. Pour ce qui est de La Défense, elle souffre de sa gouvernance : elle a été la mine d’or des trois communes qui l’accueillent sur leur territoire, mais elle doit aujourd’hui changer. Il lui faut repenser radicalement son accessibilité, son espace public, sa capacité d’adaptation à l’élévation des températures et donc sa végétalisation… Or, c’est compliqué et long de transformer une dalle. Mais le mouvement est lancé et La Défense, très bien desservie en transports en commun, conserve des atouts.

Si les quartiers de bureaux, que l’on a tant construits en Île-de-France, perdent de leur attrait, que faut-il proposer d’autre aux entreprises ?

Aujourd’hui, il ne s’agit plus de proposer seulement des bureaux mais des quartiers de vie. L’idée même de « zone d’activité » est un modèle en perte de vitesse. Avec le Grand Paris Express, il existe une opportunité d’aménager de nouveaux quartiers mixtes, vivants, diversifiés et bien reliés. Mais Paris a surtout la chance d’être moins monofonctionnelle que d’autres capitales. Elle propose un écosystème très diversifié et les start-up sont aujourd’hui, pour les sociétés qui s’installent ou se développent dans la région, des partenaires potentiels tout autant importants que l’étaient autrefois les grands sous-traitants pour l’industrie. Il y a dans ce domaine des équipements majeurs dans le Grand Paris : voyez la Station F, qui a beaucoup apporté, ou bien Matrice, lieu de formation, incubateur, centre de recherche, lieu de création… Bref, un espace hybride, dans le 15e arrondissement, qui développe des start-up du numérique. À citer encore, un programme aussi innovant que celui des « intrapreneurs », mené par Leonard, la cellule d’innovation du groupe VINCI dont les collaborateurs sont incités à développer de nouveaux modèles d’affaire innovants. Dans le domaine de la santé, on trouve l’Institut du cerveau et de la moelle épinière, à la Salpêtrière, mais aussi le tout nouveau Paris Santé Campus, bientôt installé au Val-de-Grâce, destiné à faire de la France le leader du numérique en santé. Ce qui est intéressant, c’est la grande diversité de ces lieux d’innovation qui deviennent aussi des espaces-vitrines pour la région-capitale.

Retrouvez l’intégralité de l’entretien dans le 38ème numéro d’Objectif Grand Paris

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