Créer de nouveaux quartiers, en désenclaver d’autres

Créer de nouveaux quartiers, en désenclaver d’autres

Une nouvelle ville émerge avec les gares du Grand Paris, tandis que des quartiers plus anciens sont réhabilités. Partout, la mixité fonctionnelle et s

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Une nouvelle ville émerge avec les gares du Grand Paris, tandis que des quartiers plus anciens sont réhabilités. Partout, la mixité fonctionnelle et sociale est privilégiée. Un tournant pour Nanterre que nous explique Julien Sage, maire adjoint chargé de l’Aménagement et de l’Urbanisme.

Les grues sont nombreuses à Nanterre, c’est une ville où l’on construit partout. Est-ce dans la continuité d’une politique d’urbanisme ancienne ou bien la ville est-elle aujourd’hui arrivée à un tournant ?

Nanterre s’est toujours construite avec son époque. Ses quartiers portent la trace de choix anciens qui se sont superposés, on y retrouve tous les courants urbanistiques. C’est pourquoi, c’est aujourd’hui une véritable mosaïque urbaine. Mosaïque du fait de la diversité des quartiers mais aussi de leur caractère parfois hétéroclite, voire haché ou fracturé. Mais Nanterre est surtout marquée par l’urbanisme des années 60-70, l’urbanisme de cité. C’est l’époque du zonage, qui a créé les ghettos. Aujourd’hui, il est vrai que nous arrivons d’une certaine façon à un tournant. Il est lié au Grand Paris et à l’arrivée des nouveaux transports. Le Grand Paris se présente donc comme une opportunité pour transformer la ville aussi bien que comme une condition sine qua non du renouveau : jusqu’à présent, les transports en commun étaient insuffisants. Ce sont les nouvelles gares – tramway, métro, RER – prévues dans les années à venir qui permettent la mutation des quartiers. La place de La Boule, qui n’est aujourd’hui qu’un rond-point, devient une vraie porte de Paris et un quartier métropolitain important, avec une gare qui comptera parmi les plus utilisées de la ligne 15. En face de la gare, il y a un grand immeuble qui appartient à France Habitation. Il sera démoli et on construira à la place un nouvel ensemble. Mais il y a là un défi technique ; c’est pourquoi le projet a été proposé et retenu dans le cadre du concours Inventons la Métropole du Grand Paris. Nanterre, qui est toujours restée à 80 000/90 000 habitants, pourrait désormais voir croître sa population. Nous pouvons aussi espérer une répartition différente des populations.

De nombreuses transformations sont en cours et certains quartiers changent de visage. Quels principes guident ces transformations ?

Au minimum, pour transformer Nanterre, il fallait des transports. Mais il fallait, et il faut toujours, davantage de mixité dans les quartiers neufs aussi bien que dans les quartiers existants, ceux que l’on appelait autrefois les cités. C’est très long et difficile à obtenir. Ces évolutions-là se comptent en décennies. On l’a fait à Petit Nanterre, un quartier qui recense aujourd’hui 70 % de logements sociaux environ, alors que c’était 90 % autrefois. Le quartier souffrait aussi de handicaps physiques : des coupures urbaines héritées du passé, des ponts, des voies de chemin de fer, voire des autoroutes ! Il fallait y rénover le bâti, créer un marché privé avec de nouveaux logements, améliorer les espaces publics. Quand on pense que, dans ces quartiers, tout semblait fait pour que l’on se perde, pour que l’on ne puisse pas marcher tranquillement dans des rues normales, avec des adresses lisibles de tous ! Le quartier a bénéficié d’actions en matière de politique de la ville et un projet de renouvellement urbain et social (PRUS) a été mis en œuvre à partir de 2008. Aujourd’hui, Petit Nanterre est un quartier de destination, où l’on vient par choix. Nanterre Université, qui est un secteur riche en infrastructures et en équipements – l’université Paris Ouest Nanterre La Défense, la cité administrative, la gare RATP et SNCF – devient aussi au vrai quartier vivant, avec une fac qui s’ouvre davantage sur la ville. 100 000 mètres carrés de logements, commerces et activités sont créés ; cela signifie qu’il y a de quoi se loger et travailler, certes, mais aussi des services, un cinéma et une bibliothèque, la BDIC (bibliothèque de documentation internationale contemporaine) qui est une institution de référence. On a aussi conservé une École du cirque, qui était là avant les travaux.

Un quartier en chantier, c’est aussi beaucoup de nuisances. Comment les Nanterriens perçoivent-ils ces travaux permanents ?

Les gens l’acceptent parce qu’en échange, ils voient bien que des services supplémentaires et une qualité de vie nouvelle sont apportés. Dans les logements sociaux de Nanterre Université, la réhabilitation a ainsi été conduite selon des méthodes tellement innovantes que les gens ont pu rester sur place. Il faut conserver le puzzle qui s’est créé au fil des années, mais en l’améliorant et en faisant en sorte que les pièces se rejoignent plus harmonieusement. Nous ne voulons pas être, autant que possible, dans le banal ; en fait, ce sont des opérations vraiment exemplaires.

Aujourd’hui, les nouvelles constructions se font et se feront d’ailleurs surtout à la jonction des quartiers car il n’y a plus de grand foncier disponible. Il s’agit de créer du lien pour effacer ou en tout cas apaiser les fractures physiques, comme les grandes infrastructures créées il y a trente ans, et aussi du lien pour faciliter la solidarité entre les quartiers, pour favoriser la mixité. La Boule, à cet égard aussi, est emblématique.