La perspective d’un Brexit dit « dur » suscite une vive inquiétude chez les acteurs portuaires normands : une sortie de l’Union européenne sans accord
La perspective d’un Brexit dit « dur » suscite une vive inquiétude chez les acteurs portuaires normands : une sortie de l’Union européenne sans accord pour la Grande – Bretagne pourrait avoir de lourdes conséquences logistiques et financières pour les ports de la façade atlantique française et pour leur « zone aval », c’est-à-dire la vallée de la Seine et le Grand Paris.
Les ports du « très Grand Paris » (Le Havre, Rouen…), concernés depuis juin 2017 par un plan d’action du gouvernement visant à les soutenir face à leurs concurrents du Nord de l’Europe (Anvers, Rotterdam…), ont de nouvelles préoccupations. La sortie du Royaume – Uni de l’Europe, que le Grand Paris aimerait considérer comme une opportunité, pourrait bien, pour ces ports, constituer une difficulté supplémentaire. Si les négociations en cours, actuellement menées par Michel Barnier, négociateur en chef pour l’Union européenne, aboutissent à un Brexit « dur », c’est – à – dire sans accord entre Londres et Bruxelles, l’affaire devient « une urgence nationale». C’est en tout cas le message que Le Havre, Rouen, et les autres ports de la façade atlantique française sont venus porter à Paris, par la voix de Hervé Morin, président de la région normandie.
Conséquence immédiate d’une sortie brutale du Royaume – Uni de l’Union européenne : le rétablissement du contrôle douanier à la frontière. Ce bouleversement pourrait intervenir, si l’on s’en tient à la date prévue pour la fin des négociations, dès mars 2019 et il impliquerait toute une réorganisation des ports. Selon Hervé Morin, qui tirait la sonnette d’alarme dès octobre dernier, « il faut que tout soit prêt pour le pire ».
Un épineux rétablissement de frontière
Le retour aux droits de douanes nécessiterait la mise en place d’installations permettant la perception de cet impôt ainsi que de la TVA. De plus, la Grande – Bretagne, devenant un pays tiers, les contrôles vétérinaires et phytosanitaires à la frontière seraient alors systématiques. De ce fait, il serait indispensable de créer des locaux dédiés à ces vérifications. Cela induirait également la mise en place d’aires de stockage des véhicules et des remorques. Un besoin d’espace qui pourrait conduire à la délocalisation de services actuellement présents sur les zones portuaires.
Autre difficulté à prévoir : l’alourdissement des contraintes logistiques. Les millions de tonnes de marchandises transportées chaque année entre les frontières britanniques et françaises circulaient jusqu’à présent avec fluidité. « Les gares d’embarquement s’apparentaient à un simple péage routier », expliquent les représentants des ports. Or, selon Alain Verna, président de Logistique Seine Normandie, « 2 minutes de plus consacrées à des formalités complémentaires, c’est 27 km de bouchons créés ».
Cette réorganisation a aussi – et peut – être surtout – un coût, évalué par Hervé Morin à « plusieurs dizaines de millions d’euros». Comme toujours dans ce type de circonstance, c’est vers l’État que l’on se tourne, en espérant obtenir le financement total ou partiel des installations douanières rendues nécessaires pour le Brexit.
Les ports normands sont inquiets. Ils ne sont pas les seuls : difficile en effet d’imaginer que l’aval échappera aux problèmes de l’amont… L’approvisionnement du Grand Paris et son organisation logistique dépendent pour partie de l’axe Seine et de la fluidité des transports qui y sont organisés. Les difficultés des ports de la façade atlantique, si elles venaient à se confirmer, se répercuteraient forcément sur les territoires d’une métropole déjà bien encombrée, et les coûts et délais d’acheminement en seraient fort probablement alourdis.