L’Amif veut mobiliser les policiers municipaux

L’Amif veut mobiliser les policiers municipaux

Pour améliorer la sécurité dans leurs communes, les élus d'Île-de-France pourraient privilégier l'armement et la formation des polices municipales. Pr

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Pour améliorer la sécurité dans leurs communes, les élus d’Île-de-France pourraient privilégier l’armement et la formation des polices municipales. Problème : le coût. Les maires remettront au premier ministre leurs propositions en avril prochain.

Le maire peut-il agir pour améliorer la sécurité sur le territoire communal ? La question, selon les élus réunis par l’Amif en décembre dernier, prend une acuité accrue depuis les attentats parisiens du mois de novembre.

Première réponse apportée par ces élus, la plus couramment d’ores et déjà mise en œuvre : le maire peut et doit jouer un rôle d’interface entre ses administrés et les autorités administratives, notamment préfectorales, qui peuvent prendre des mesures spécifiques –interdiction de réunions publiques, fermetures de salles, etc. – dans des circonstances particulières. Il lui appartient aussi, souligne Alexandre Giuglaris, délégué général de l’Institut pour la Justice, « de favoriser un climat général lui-même favorable à la sécurité, en renforçant l’autorité républicaine et en rapprochant la justice des citoyens ».

D’autres efforts sont déjà conduits avec plus ou moins d’efficacité et d’ambition dans diverses communes. Ainsi, certaines villes ont-elles mis l’accent sur le développement de la vidéo-protection et d’un éclairage nocturne conçu pour « sécuriser » certaines zones considérées comme plus dangereuses que d’autres, parfois dans un simple contexte de « délinquance ordinaire ». D’autres favorisent la « coproduction de la sécurité » en encourageant des dispositions mises en œuvre avec les administrés eux-mêmes comme les opérations « Voisins vigilants » pendant les vacances. Ils peuvent aussi tenter d’associer les bailleurs sociaux à la surveillance de quartiers ou de résidences. Dans des quartiers jugés plus « criminogènes » que d’autres, des couvre-feu ont pu être mis en place.

Plus d’armes, plus de formation

Pour Thibault de Montbrial, avocat pénaliste au Barreau de Paris consulté par les maires de l’Amif, « il s’agit maintenant de changer de logiciel. C’est difficile à admettre mais c’est ainsi : on sort de 70 ans de paix… »Résultat, pour l’avocat, « Il faut donner des moyens supplémentaires aux polices municipales et des structures d’entraînement plus efficaces ». Une perspective qui impose des obligations en cascade : un armement plus conséquent suppose d’abord une formation sérieuse, c’est-à-dire du temps de travail et un coût budgétaire non négligeable. Cela implique aussi toute une série d’obligations administratives et réglementaires généralement très lentes à mettre en œuvre. Autre impératif selon l’avocat : faire progresser l’armement : « Pour l’instant, affirme-t-il, les policiers sont armés, quand ils le sont, de pistolets 7,65 mm, alors que le 9 mm apparaît désormais comme un minimum. » Les équipages de police armés devraient encore, toujours pour Thibault de Montbrial, disposer d’armes longues (fusil à pompe).

Dans ce contexte, les élus ont exprimé leur intérêt pour la proposition formulée par François Hollande devant les maires de France réunis en congrès. Le président de la République avait, à cette occasion, déclaré que l’État pourrait « apporter aux maires qui le souhaitent des armes pouvant être prélevées sur le stock de la police municipale ». Un stock de 4 000 armes en principe disponibles avait été mentionné en janvier 2015. Toutes, semble-t-il, n’ont pas été réclamées par les communes et celles qui l’ont fait n’ont pas encore obtenu de réponses… Ce sont également des règles qui devraient être modifiées, d’après Thibaud de Montbrial : au-delà de la légitime défense, trop étroite et complexe, une « période de danger absolue » (PDA) pendant laquelle le policier aurait un droit de riposte pourrait être instituée. Cette PDA, explique l’avocat, doit cependant être rigoureusement encadrée : ses critères de déclenchement restent pour l’instant à établir aussi bien que sa durée et ses conditions d’exercice.

Résistances et lourdeurs administratives

Des préconisations très volontaristes généralement approuvées par des élus soucieux d’apporter des réponses dans un domaine sur lequel ils se sont jusqu’à présent positionnés avec prudence. La commission Sécurité de l’Amif, présidée par Dominique Bailly, maire de Vaujours, en Seine-Saint-Denis, n’en perd pas pour autant de vue les difficultés qui restent à vaincre.Elles tiennent d’abord aux résistances des policiers municipaux eux-mêmes : certains estiment qu’il ne leur appartient pas d’être armés et qu’une telle responsabilité va au-delà des missions – stationnement, circulation… – qui leur étaient à l’origine attribuées.

Autre obstacle relevé, en particulier par Christian Robache, le maire de Montévrain, commune rurale qui connaît une très forte croissance démographique, « les contradictions affichées par bon nombre d’administrés qui semblent demandeurs d’autorité et de réglementation mais qui renâclent face au paiement de la moindre contravention ». Surtout, et l’objection fait ici l’unanimité, les maires dénoncent la lourdeur des coûts liés à la sécurité et à tout effort supplémentaire en la matière. « Les dotations et les aides existent, certes, souligne le maire de Montévrain, mais elles sont peu adaptées aux coûts réels. » Les élus s’entendent également à dénoncer la lenteur des procédures ; les soutiens financiers sont longs à obtenir et tout changement, dès lors que des armes sont en cause, fait l’objet de longues procédures d’enquête, d’agrément et/ou d’autorisation.

Comment équilibrer les budgets, dans un contexte de baisse des moyens publics et des dotations, en prétendant accroître la disponibilité des personnels, le nombre de véhicules, la qualité des armes ? Une quadrature du cercle de plus pour les maires réunis par la Commission Sécurité de l’Amif… La réflexion, pourtant, doit se poursuivre : elle fera l’objet d’un « livre blanc » qui dressera, dans les mois à venir, un état des lieux en matière d’implication des communes pour la sécurité et formulera, souligne l’Amif, une série de propositions à présenter aux autorités nationales. Ce « livre blanc » devrait être remis au premier ministre en avril 2016 à l’occasion du salon annuel de l’Amif.