Jean Rebuffel « à l’écoute des promoteurs et des maires »

Jean Rebuffel « à l’écoute des promoteurs et des maires »

Six mois après sa nomination, le « médiateur régional de la construction de logements », nommé pour accélérer les dossiers de construction bloqués, n’

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Six mois après sa nomination, le « médiateur régional de la construction de logements », nommé pour accélérer les dossiers de construction bloqués, n’est pas submergé ! Les promoteurs, qui demandaient pourtant que leurs dossiers soient instruits plus rapidement, ne se précipitent pas sur l’aide nouvelle qui leur est proposée. De la difficulté de mettre ses affaires sur la place publique…

Chacun connaît la complainte favorite des aménageurs et promoteurs. En substance : « Trop de normes, trop de recours, trop de lenteurs en tout genre, qui nous empêchent de mener à bien nos projets et, in fine, entravent la construction en Île-de-France… »

Des difficultés qui, d’après ces professionnels, pèsent lourd sur des chiffres de la construction qui restent éloignés, de fait, des objectifs – 70 000 logements par an, dont 25 000 logements sociaux – fixés par le gouvernement.

D’où la tentative inédite du préfet de Région, Jean-François Carenco, qui a nommé, fin 2015, un « médiateur régional de la construction de logements ».

Une fonction nouvelle pour une mission inédite : débloquer les écheveaux les plus embrouillés, mettre de l’huile dans les rouages bloqués, relancer les projets dans l’impasse…

Ceux qui espéraient, pourtant, un chevalier blanc capable de trancher dans le vif et de prendre des décisions rapides en seront pour leurs frais : le nouveau médiateur « se contentera » d’instruire les dossiers puis de les transmettre pour traitement final à la préfecture.

C’est plutôt sur la méthode qu’il entend déployer que Jean Rebuffel met l’accent : très attaché « à l’écoute, au dialogue et à la pédagogie », le médiateur s’appuiera sur sa longue expérience du terrain pour accélérer le règlement des dossiers. Cet ingénieur des Ponts, qui a occupé de nombreux postes au sein de l’ancien ministère de l’Équipement et en établissements publics d’aménagement, a conduit plus récemment une mission d’inspection territoriale. De quoi faire de lui un fin connaisseur du montage des projets et des négociations de terrain…

Des étapes obligées

« Tout commence par un promoteur qui a repéré un site. Il faut négocier avec le propriétaire. Ensuite, signer une promesse de vente sous conditions suspensives. Puis déposer un permis. Suit l’instruction. Il faut encore purger les recours. La vente est lancée et les premiers travaux peuvent suivre. Si tout va bien, quatre ans au moins se sont écoulés, pour une soixantaine de logements. Si le maire craint la densité, si l’architecte des bâtiments de France a son mot à dire, bref, si quelques anicroches s’en mêlent, on passe très vite au quinquennat…, explique Jean Rebuffel. S’il s’agit d’un écoquartier, alors là, il faut plutôt compter dix ans… »

Les causes d’une lenteur que l’on s’accorde souvent, à tort ou à raison, à juger « bien française » ? La cherté du foncier, la multiplication des normes, souvent alourdies par les agglomérations, la difficulté qu’il y a à mettre en place un tour de table financier lorsqu’il s’agit de logement social… Et, par-dessus tout peut-être – une cause que l’on affiche moins ouvertement pourtant –, la frilosité de maires pour qui les mots de « densification », de « hauteur » ou de « logement social », à eux tout seuls, font parfois figure d’épouvantails.

Sur tous ces terrains, ou presque, le médiateur peut agir…modestement. « En matière de logement social, il est possible d’aider, notamment pour la mise en place d’un tour de table financier. On peut essayer d’optimiser les plans de financement, dans le cadre d’opérations qui sont toujours très tendues. »

User de pédagogie

Surtout, le médiateur entend user de son sens de la souplesse et de la pédagogie. « Lorsque l’on explique au maire que le logement social concerne une très grande partie de la population, que cela peut aider de jeunes couples de la commune, que cela soutient les étudiants, il peut se laisser convaincre », affirme Jean Rebuffel.

Bien des blocages pourraient être évités avec un peu de souplesse dans la négociation, estime ainsi le médiateur.

La méthode a-t-elle déjà fait ses preuves ? « Peu, à dire vrai ! », s’exclame Jean Rebuffel. En fait, alors que le préfet de Région pensait que le médiateur croulerait sous les dossiers, celui-ci reste surpris par le peu d’engouement des promoteurs pour la formule.

Six mois après sa prise de fonction, la médiation de la construction de logements n’a été saisie que de huit dossiers en tout et pour tout, dont deux sont présentés par des communes et six par des promoteurs. « Bien plus nombreuses », souligne malicieusement le médiateur, « sont les demandes de conseils officieux ! »

Comme si, en fin de compte, les promoteurs se plaignaient haut et fort tant qu’il s’agissait de rester dans les généralités, mais préféraient demeurer discrets au chapitre de leurs propres affaires…

Tout cela sera-t-il au bout du compte efficace ? Encore une fois, Jean Rebuffel préfère rester modeste : « C’est la conjoncture qui change la donne en matière de construction ! Les dossiers naissent et progressent quand la croissance est là. Mais on peut apporter une aide, si les premiers intéressés, au bout du compte, la souhaitent ! »